Oui ! Ma vie sera celle-ci ! Vous, gonflés par l'opulence, éteints par la routine, ne vivrez pas le quart de mes sensations, n'aimerez que superficiellement des créatures sans formes, sans texture, sans relief.
Vous serez éblouis par le futile progrès technique, l'illusion que l'humanité progresse. Vous vous sentirez sains au cœur d'un groupe sain, sans déceler les failles, les fissures qui conduiront à l'éclatement.
Bientôt je ne serai plus qu'un esprit. Mon corps abandonnera tout combat pour sa survie. Les spectres qui hantent vos nuits me rejoindront dans mes délires. Nous vivrons des heures fantastiques à inquiéter votre sérénité, la troubler, puis l'anéantir.
Lors du sursaut final, je rejoindrai cette armée en marche. Je pourrai enfin me consacrer tout entier à vous maudire. Vous serez la proie des cauchemars. Votre esprit finira par vous échapper. Le goût pour l'opulence vous quittera. Vous deviendrez, comme moi, un homme attendant sa mort dans la rue, maudissant ceux qui se terrent derrière les murs gris.